Et si c’était le moment où jamais pour oser faire le grand saut ? 🙀
- alice langlet
- 3 avr. 2022
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 4 avr. 2022
On peut tous avoir envie de changement dans notre carrière professionnelle. Quand on est femme, mère et que l’on a plus de 40 ans, est-ce vraiment raisonnable de rêver à un poste de dirigeante dans une entreprise étrangère où l’on aura ni le réseau professionnel, ni les codes de l’entreprise, ni les codes culturels ? Sarah Micucci, CEO de BLS Cargo Italia, nous partage son expérience.
Avant d’aller plus loin, il est nécessaire de préciser que BLS Cargo est une entreprise suisse, qui détient des filiales en Italie, Allemagne, Belgique. SNCF Logistics prend une participation à 45% dans BLS Cargo.
Quel a été le déclic pour vous dire que votre prochain poste serait un poste de dirigeante ?
« Je n’ai jamais eu un profil d’experte. Je me sens bien dans une posture transverse où les missions sont variées, où je peux contribuer à donner du sens, une vision système. Je suis à l’aise dans une posture de facilitatrice au sein d’équipes pluridisciplinaires. J’ai toujours alterné des postes opérationnels et fonctionnels, plutôt dans le domaine de la finance et la planification de la production ferroviaire. Mon projet était d’apprendre à maitriser tous les aspects d’un business model pour faire en sorte d’atteindre, en collectif, les objectifs stratégiques d’une entreprise.
Après 20 ans d’expérience chez SNCF j’ai ressenti une forme d’impatience, un besoin de me challenger et de saisir une opportunité qui allait me sortir de ma zone de confort. En prenant le poste de CEO de BLS Cargo Italia, j’ai eu le sentiment de rebattre les cartes du jeu car tout était nouveau pour moi : les personnes, le secteur d’activité, la culture d’entreprise. Rien ne m’obligeait à sortir de ma situation de confort, pourtant j’avais un besoin profond d’écouter mon instinct et oser me lancer dans l’inconnu. »
Quel a été votre défi personnel dans cette prise de poste de CEO ?
« Précédemment j’étais Directrice des Opérations de SNCF Voyages Italia, donc d’une entreprise française à l’étranger. Un poste qui englobait l’exploitation ferroviaire, la finance et la planification de la production.
Un poste de CEO me semble davantage tourné vers l’extérieur de l’entreprise. Il consiste à faire le lien, à construire une synergie et une coopération forte entre la filiale et le groupe. Il s’agit là de faire en sorte que le système du groupe n’efface pas les différences, mais les valorise pour le rendre plus fort en s’appuyant sur ces cultures et compétences différentes. La posture de CEO permet d’être en prise directe avec le conseil d’administration et de rendre la vision du groupe non seulement audible mais surtout engageante pour toutes ses équipes.
L’enjeu pour moi réside avant tout dans le fait de trouver :
Une base de culture et de valeurs communes pour faire de la différence multiculturelle une richesse,
Une façon optimale de travailler aux interfaces entre la maison mère en Suisse, la filiale en Italie et les autres filiales dans les autres pays Européens.
Sortir de la relation de dépendance à la maison mère pour construire une relation de parité qui fera exister concrètement les synergies au sein du groupe.
Être un groupe, avoir des filiales n’est pas qu’une question de logistique. On est plus fort quand on a une filiale d’un pays qui connaît mieux les spécificités locales, la réglementation, … et comment les exploiter pour être performant sur son marché. L’enjeu est donc de savoir être à l’écoute des différences pour s’enrichir au maximum de chacune d’elle. »
Concrètement, comment faites-vous dans cet environnement multiculturel pour permettre et maintenir cette posture d’ouverture et cette relation de parité ?
🐾 « Trouver une langue commune – la langue peut être une barrière et même en la maitrisant parfaitement le non verbal qui est prépondérant dans la communication entre les individus peut être un frein. Pour moi, la meilleure solution pour un groupe de plus de 2 personnes est de choisir une langue neutre, (pour nous chez BLS entre italiens et suisses allemands c’est l’anglais) De ce fait on re créée la parité, cette langue sert de socle commun pour nos échanges et gomme les identités culturelles. En revanche, quand nous réalisons des échanges à deux personnes, nous choisissons la langue qui nous convient le mieux, celle avec laquelle nous sommes le plus à l’aise.
🐾 Valoriser ce que l’on a en commun – jouer au jeu des différences et stigmatiser l’autre pourrait être un réflexe. Il peut être tentant de rentrer dans la caricature et user d’un biais de généralisation. Par exemple, de dire que les Italiens sont créatifs et passionnés, les allemands sont hyper carrés... 😊 En mettant l’accent sur ce que l’on a en commun on décolle les étiquettes, on revient à l’autre en tant qu’individu. Valoriser ce qui nous rapproche permet de créer une identité commune, plutôt que de cristalliser sur ce qui nous divise.
🐾 Voir la différence comme une source d’enrichissement permet d’être plus créatif et performant dans la résolution de problème, d’où la nécessité de créer un terrain d’échange neutre par l’usage d’une langue comme l’anglais. C’est valable également avec d’autres aspects que la langue. Dans un groupe de travail, chacun arrive avec ses repères, ses croyances et il essaie de contribuer au collectif avec ses propres schémas de pensée, ses fonctionnements, son cadre de référence.
🐾 Prendre le temps de l’écoute de l’autre. Plus un sujet apporte des problématiques humaines et relationnelles, plus il est nécessaire de se détacher du cadre, de l’urgence et de prendre le temps d’écouter l’autre et d’analyser la situation. C’est-à-dire se questionner sur les intentions de l’autre, observer les ressentis et les émotions des autres. Cela peut sembler banal, mais à trop vouloir cadrer un problème sans analyser ce qui est du ressort relationnel, se contenter du processus strict ne permet pas d’atteindre le résultat souhaité dans un environnement multiculturel.
🐾 Rester ouvert à la recherche de solutions communes prises sur la base d’un travail en intelligence collective. Chercher des solutions par consentement et non par consensus. La solution qui convient à tout le monde, ne convient en réalité à personne et tire le collectif vers le bas. Je suis convaincue qu’une solution dans laquelle chacun aura apporté sa pierre à l’édifice pourra mieux l’accepter et fonctionnera davantage, même si elle n’est pas celle envisagée au départ ».
Dans cette aventure de dirigeante dans un contexte multiculturel, l’animal totem de Sarah Micucci est le chat. Un animal particulièrement agile, aux capacités d’adaptation et de communication étonnantes.

🤔 Que nous apprend le chat ?
😺 Agilité – Quelles que soient les circonstances l’agilité du chat n’est plus à démontrer. Tel un funambule, il est capable d’acrobaties périlleuses et retombe toujours sur ses pattes. Une qualité appréciable dans une équipe où la flexibilité et la capacité d’adaptation à des situations hors normes est de mise. Encore faut-il lui proposer les challenges et lui laisser suffisamment de marge de manœuvre pour démontrer ses compétences. Quel terrain de jeu et quelles latitudes laissez-vous aux félins de vos équipes ?
😺 Sociable et coopératif – c’est pour établir une communication avec l’être humain et mettre en place une relation gagnant-gagnant que le chat se serait mis à miauler. La coopération est alors devenue possible. En créant ce langage sonore et corporel (par la position des oreilles, de la queue et des moustaches), il fait savoir ses intentions et exprime ses demandes. Prenez-vous le temps d’écouter vos collaborateurs ? Savez-vous décoder leur communication non verbale ? Sur la base de quel socle commun échangez-vous pour établir un partenariat gagnant-gagnant ?
😺 Singulier et indépendant – le chat a du caractère, s’il est sociable, il n’acceptera pas de gommer son identité pour se faire accepter par le collectif. En société, le chat a besoin d’être reconnu pour sa différence, son identité et d’être accepté comme tel. Il tient à son indépendance, son libre arbitre et ne se laissera pas aller au conformisme. Comment vous y prenez-vous pour reconnaitre l’identité et la différence de chacun de vos collaborateurs afin que celle-ci vienne enrichir votre collectif ?
😺 Parité – cet animal de territoire a pour habitude de choisir son maître. Autrement dit, c’est vous qui habitez chez lui et c’est vous qui êtes choisi, pas l’inverse ! Vous tenez à avoir une équipe engagée et performante ? Pour éviter de transformer votre équipe en chats de salon neurasthéniques, comment mettez-vous en place une relation de parité avec vos collaborateurs ?
🙏 Le mot de la fin par Sarah Micucci 🙏
« En Italie, en 2021 seulement 3% des CEO étaient des femmes (elles étaient 4% en 2020…). Lors de mon choix de poste, je me suis clairement demandé si j’avais été choisie par volonté de féminiser une fonction dans laquelle la présence d’une femme enrichirait la performance de l’entreprise. Je pense qu’aujourd’hui, les hommes s’aident davantage entre eux que les femmes ne le font. Nous sommes capables de plus d’entraide et de sororité pour nous soigner du syndrome de l’imposteur et valoriser nos compétences afin de prendre pleinement la place et les responsabilités que l’on souhaite prendre dans notre vie professionnelle. »
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